Un regard de beauté et de bonté sur la vie et tout ce qu'elle nous offre au quotidien.
Le mai de la mission
Avec le « joli mois de mai », c’est l’hiver austral qui doucement s’installe sur les Hauts Plateaux malgaches. Cela signifie : les matins frisquets, les soirées plus courtes, le vent qui souffle fort dans la journée, entrainant des tourbillons de poussière. Tout cela sous le soleil, fidèle au rendez-vous, mais juste un peu moins chaud. Cela signifie aussi pulls et chaussettes (enfin, pas pour tout le monde !)
Mais le climat hivernal n’arrête pas les vaillant(e)s missionnaires - ni les vaillantes sœurs ! - qui, jusqu’au bout, en baskets ou en sandales, assument la vie malgache dans ses différentes facettes.
Vaillante missionnaire… initiée au port de la soubique (entendez du panier) après deux ans de malgachisation
Pour ma part, ma mission linguistique et pédagogique auprès des enseignants des écoles primaires des sœurs est terminée. Deux belles sessions à Ambohimanala l’ont clôturée : la première, « inter-écoles » avec tous les enseignants des trois écoles, soit une trentaine de personnes (deux hommes seulement !), y compris les sœurs directrices et enseignantes et la seconde avec les profs d’Ambohimanala. Avec l’aide de Mme Régine, formatrice malgache en pédagogie, nous avons souhaité amener les profs à s’interroger sur leurs pratiques pédagogiques. Le film « Être et avoir » a servi de support pour des échanges fructueux, en français et malgache. Le dialogue, la relecture d’expériences, la réflexion : ce temps de formation, de l’avis de tous, a constitué un « souffle », une pause bénéfique dans le parcours de ces enseignants. À l’unanimité ils sont motivés pour poursuivre d’une façon ou d’une autre leur formation continue en français et pédagogie. Je ne pouvais rien souhaiter de mieux, à quelques semaines du départ (eh oui, déjà !) que de laisser chez les enseignants l’empreinte optimiste de la possibilité d’évoluer dans leur profession d’éducateurs. Espérons que la mayonnaise ne va pas retomber trop vite….
Mais la tâche accomplie ne marque pas le début des vacances pour autant. Un autre service m’a été demandé, avec Sr Mauricette (Camerounaise), de la Congrégation des Petites Servantes du Cœur de Jésus : nous donnons ensemble un cours de pédagogie (30 heures) au grand séminaire d’Antsirabe. La classe des séminaristes de première année compte 68 élèves ! Un chiffre qui pourrait faire pâlir quelques nostalgiques de « l’ancien temps » : la machine à fabriquer des prêtres tourne encore assez bien ici, malgré le manque criant de moyens matériels et financiers. Devant la frugalité des repas et la pauvreté des bibliothèques (ce ne sont que des exemples, mais cela concerne sans doute tous les aspects de leur vie quotidienne), on compare forcément avec le confort matériel de nos vieilles institutions essoufflées… Je me prends alors à rêver d’un geste de générosité, d’un partage de bien équitable qui permettrait d’assurer des études plus confortables à ces jeunes pleins de vie et de vigueur. Mais nos Églises occidentales ont d’autres chats à fouetter et le partage paulinien, s’il existe par le biais d’honorables associations ecclésiales (ou non), n’est vécu qu’à distance, dans l’ignorance de ce que vivent ces jeunes déshérités. Pour cette raison, la voix des missionnaires tend à se faire entendre ailleurs qu’en haut lieu d’Église, elle est semée à tout vent dans les paroisses, les cercles amicaux, les réseaux, elle porte du fruit au niveau du peuple (et l’on se désole en haut lieu de la baisse des donateurs pour le Denier de l’église ! Allez savoir pourquoi…)
Bref, tout cela pour dire, vous l’avez compris, que le fossé entre pauvres et riches reste immense, mais, heureusement, le manque de moyens matériels ne parviendra pas à éteindre le souffle de l’Esprit ici, tout comme la surabondance matérielle ne parviendra pas à le noyer dans nos sociétés occidentales. Entre les deux, il faut trouver l’équilibre !